“La fermeture du Musée national du Bardo aux visiteurs depuis plus de trois mois porte préjudice à l’image du pays, sans oublier le manque à gagner après presque deux ans de Covid-19. Et si nous avons essayé de comprendre cette mesure de fermeture pour le public, qui reste quand même très discutable, il est absolument incompréhensible et même inadmissible de ne pas permettre aux employés d’accéder au Musée au moins trois jours par semaine, sinon tous les jours”, a indiqué l’universitaire Habib Ben Younes, ancien conservateur général du Musée du Bardo et ancien directeur de la division du développement muséographique à l’Institut national du patrimoine (INP).
Dans une déclaration à l’agence TAP il a précisé que tout le périmètre de l’assemblée des représentants du peuple et du musée est sécurisé et personne n’y accède depuis le 25 juillet 2021.
Et d’expliquer “Si la sécurité est assurée, la conservation des œuvres ne l’est pas dès lors que le Musée est constitué d’un Palais ancien en plus du nouveau bâtiment. Cela a des exigences et le contrôle du palais doit être continu. Quel est l’état de la Collection Unique des Bronzes de Mahdia, par exemple ? On peut multiplier ainsi la liste des œuvres délicates et qui exigent un contrôle : la poussière qui a du s’accumuler sur les statues et les mosaïques. Même le contrôle des installations électriques et autres est une exigence”.
Dans ce sens, il formule le vœu que “la ministre des Affaires culturelles puisse être sensible à cet état de fait afin de l’expliquer en haut lieu”. En attendant, a-t-il averti, “les voyants sont au rouge et c’est la pérennité des collections qui est menacée et là c’est trop grave pour l’histoire du pays, espérant que nous n’allons pas écrire l’Histoire noire du Musée du Bardo”.
SOS les Collections du musée national du Bardo
En effet, a-t-il assuré, l’ouverture du musée pour le personnel est une nécessité absolue, il en va du salut de beaucoup de ses collections.
La collection de Mahdia, par exemple, est unique par sa composition en Méditerranée et dans le monde. Certains bronzes sont des pièces exceptionnelles parfois uniques par rapport à tous les musées Méditerranéens et européens.
Après l’incendie qui a ravagé une grande partie des sous-sols du musée au milieu des années 80, la fumée a endommagé cette collection qui souffrait déjà de conditions précaires de conservation.
Dans le cadre de la coopération tuniso-allemande, cette collection a bénéficié d’une aide financière du ministère allemand des Affaires Etrangères pour sa restauration à Bonn par plusieurs équipes de spécialistes.
A son retour à Tunis, les bronzes ont été exposés dans des vitrines dont l’humidité était contrôlée totalement et tout le temps. Des contrôles périodiques des déshumidificateurs et des objets étaient pris en charge par le laboratoire central.
Ces vitrines étaient même branchées sur un générateur de secours qui vont fonctionner en cas de coupure de courant sur le monument ou la région. “Pour vous dire tous les efforts consentis pour la sauvegarde des bronzes” a-t-il rappelé.
Tant d’efforts pour la pérennité de ces trésors et tout l’argent, l’effort de générations, peuvent partir en fumée si on laisse le musée inaccessible au personnel.
“Il s’agit d’une affaire Nationale et de Sécurité Nationale et j’espère que le ministère agira en ce sens le plus rapidement possible”, a-t-il conclu.
Il est à noter qu’aucune source n’a été joignable au Musée du Bardo pour avoir d’amples détails sur cette situation.